[Mopti Check] : sur les traces des « fact-checkeurs » du Mali
La Communauté des blogueurs du Mali (Doniblog) a organisé, le jeudi 14 avril 2022, un Space sur twitter sur le thème de la lutte contre les fake news au Mali. Les acteurs du secteur ont parlé de leur travail et des difficultés qui vont avec dans un environnement hostile.
Depuis quelques années, les propagations des fausses informations se sont intensifiées dans notre pays. En plus de la crise sécuritaire, le Mali a aussi connu une crise sanitaire avec le covid-19. La diffusion et la circulation des fausses informations dans ces deux crises ont fait beaucoup de dégâts sur la résolution de ces crises.
Selon le premier intervenant du Space, Abdoulaye Guindo, président de Doniblog, l’idée de la lutte contre les fake news au Mali a débuté avec l’élection présidentielle de 2018. Depuis, les initiatives ne manquent pas pour la lutte contre les fausses informations, aussi bien dans la presse écrite ou dans les radios locales.
« Nous avons une rubrique spécifiquement dédiée à la lutte contre les fake news. Il s’agit de BenbereVerif, nos blogueurs traquent au quotidien les fausses informations qui circulent sur les réseaux sociaux dans notre pays. Nous avons aussi des partenariats avec certaines radios locales qui font la reprise de nos contenus dans les langues nationales », explique-t-il.
Un travail non compris
Depuis un certain temps, la lutte contre les fake news est devenue une affaire de tous, avec l’implication d’autres acteurs de la société civile. Mais, beaucoup de nos compatriotes hésitent encore à faire confiance aux vérificateurs. Les vérificateurs aussi sont confrontés à des difficultés sur le terrain. Entre les problèmes d’accès aux sources d’informations et l’accès difficiles des zones à couvrir, il y aussi la délicatesse des sujets à aborder dans un contexte de crise.
« Le travail du fact-checkeur n’est pas très loin du journalisme classique. Ce sont les faits qui sont importants. Dans notre travail, nous sommes confrontés à des difficultés dans un contexte de tension. Il y a des sujets qui sont très difficiles à traiter, par exemple celles d’actualité sur l’opération de Moura ou les informations qui font état des villages libérés ou des déplacés qui sont retournés dans leurs localités. Souvent sans faire un vrai travail de vérification, le bon sens peut nous pousser à douter des informations qui n’ont pas de sources », témoigne Lassana Niangaly, co-fondateur du site lejalon.com.
Concernant les limites des fact-checkeurs, Aliou Diallo de BenbereVerif explique surtout la rapidité des diffusions des fake news sur les réseaux sociaux notamment dans les groupes WhatsApp. « Dans un village près de Dioïla, j’ai discuté avec des jeunes qui parlaient d’un prétendu tunnel que l’armée malienne aurait découvert dans le cercle de Niono. En tant que fact-checkeur, j’avais du mal à convaincre ces jeunes que cette information était fausse. Ils ont reçu l’information à travers la radio et n’avait même pas de téléphone capable d’accéder à l’internet. Souvent les limites du métier, c’est que les articles des fact-checkeurs n’atteignent pas beaucoup de personnes », explique-t-il.
Un secteur en essor
Le secteur de la vérification des faits ne cesse de s’accroitre dans notre pays. Si au départ, ils étaient peu à s’investir dans la lutte contre les fake news, aujourd’hui, ils sont nombreux les hommes de médias à faire ce travail. En plus de la presse en ligne, la presse écrite et certaines radios font le travail de vérification.
En 2019, la plateforme des blogueurs Benbere et Lejalon étaient les pionniers du secteur. Aujourd’hui, ils ont été rejoints par d’autres initiatives comme la rubrique de vérification de l’Association des blogueurs du Mali et de celle du studio Tamani.
Les échanges ont duré pendant une heure avec des questions des participants qui ont voulu en savoir plus sur les formations organisées par Doniblog et le Jalon. Le Space a pris fin avec des astuces sur les outils de vérification et surtout sur les bonnes manières à adopter en face des fausses informations. Il faut noter que la diffusion des fausses informations peut engager la responsabilité pénale de son auteur, mais elle peut avoir aussi des conséquences néfastes sur notre vie en communauté.
Yacouba DRAME