
Mali : les syndicats de police sur la sellette
Le vendredi 3 septembre 2021, les syndicats de la police nationale ont fait libérer l’ex-commandant de la Force anti-terroriste « Forsat » de la prison centrale de Bamako.
En nombre avec des tirs en air, des centaines de policiers ont convergé vers la Maison centrale d’arrêt de Bamako ce vendredi 3 septembre 2021. Sous pression, le commissionnaire divisionnaire Oumar Samaké, alors encellulé dans l’affaire dite des tueries du 10 au 12 juillet 2020, a été remis en liberté.
La justice au vert
Quelques heures plus tard, depuis « son bureau » le commandant se fait fièrement photographier avec deux de ses hommes armés jusqu’aux dents comme pour envoyer un message. Il n’en fallait pas plus pour que les partisans de ceux, sur qui, le couperet de la justice est tombé depuis quelques semaines jubilent. « La justice ne s’attaque qu’aux faibles ».
La dernière note trimestrielle sur les tendances des violations et atteintes aux droits de l’homme au Mali de la division des droits de l‘Homme de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali ( Minusma) note que « le Ministre de la Défense et des Anciens combattants a signé plusieurs ordres de poursuite contre des militaires qui auraient été impliqués dans des violations des droits de l’homme ». une autre avancée à mettre au compteur de la lutte contre l’impunité surtout au sein des forces de défense et de sécurité. Alors que la dame justice donne des signaux d’espoirs depuis quelques mois, cette défiance des policiers est une entorse pour la lutte contre l’impunité.
Halte au corporatisme
Le syndicalisme n’est pas le corporatisme. Sous nos cieux, des cas d’inconduites des éléments de la police ne manquent pas et rarement elles ont été sanctionnées.
Quelqu’un doit dire aux syndicalistes de la police que la fin de l’impunité passe par une rétribution équitable de la justice. Parlant de l’implication de la Forsat dans la répression des manifestations de juillet 2020 à Bamako, l’ancien ministre de la Sécurité intérieur Salif Traoré avait déclaré dans une interview accordée à Olivier Dubois pour le journal LePoint. « S’ils reçoivent un ordre illégal et l’exécutent, ils sont tenus pour responsable ». Quelqu’un doit rappeler cela aux policiers.
L’impunité de la rue
En novembre 2017, le chroniquer Mohamed Youssouf Bathily « Ras Bath » alors à son apogée avait fait reculer la justice. Reconnu coupable en première instance, il sera par la suite acquitté après l’abandon des poursuites par le ministre public. En mars 2020, des milliers de personnes avaient empêché un juge d’entendre l’imam Mahmoud Dicko.
Le triste spectacle du vendredi 3 septembre 2021 n’est qu’une marche de plus vers la consolidation de la culture de l’impunité de la rue au Mali.
Le pouvoir judiciaire n’est que coquille vide sans l’accompagnement du pouvoir exécutif. Que des policiers, auxiliaires de la justice défient la justice est inadmissible.
Aliou DIALLO