
Mopti : la jeunesse défie l’insécurité par l’ambiance
« Tu vas à Mopti, tu n’as pas peur ? » « Je te déconseille la zone en ce moment », « sois prudent ! » voilà entre autres ce que j’ai entendu quand je me préparais pour une mission à Mopti.
Dans un bus de transport en commun, départ de Bamako à 4 heures du matin, les mises en garde des amis, parents logés dans un coin de la tête. Du côté de mon siège, je scrutais les broussailles, j’imagine un groupe d’homme armé caché derrière chaque buisson et prêt à nous barrer la route.
Une autre réalité à Mopti
Dans la ville de Mopti et Sevaré, les fils de barbelés anti-intrusion montés sur les murs, ou encore ces sacs de sable autour des commissariats et devantures des camps militaires et les camps de déplacés témoignent qu’on est au cœur d’une vaste zone d’insécurité.
Il est minuit passé à Sevaré, plus de place vide à la devanture de la discothèque de la place. Des voitures et motos occupent toute l’esplanade. Pour assurer la sécurité, un seul homme avec un physique imposant et un détecteur de métaux à la main. Voilà tout le dispositif de sécurité devant un lieu de loisir dans une ville ceinturée par des groupes extrémistes violents. « Je saurais faire face à tout danger » rassure le gaillard.
6 places à 30 000 FCFA
À l’intérieur la musique déchire les tympans, un monde juvénile s’entremêle et frétille aux pas d’un disque joker (DJ). Plus de place, même la zone dite « VIP », où 6 places coutent 30 000 FCFA affiche plein. De la boisson de toutes sortes, alcoolisées ou non, des chichas (narguilé) sont consommés sans modération. Les chansons sont répétées en chœur par une foule en extase. Une ambiance de folie. Une jeunesse aux antipodes de l’image d’une région en proie à des violences multiformes.
Un moment de folie qui tranche avec la réalité et le quotidien d’une population martyre. On oublie qu’à peine 10 km de la ville de Sevaré sur la route de Bandiagara, l’État n’existe plus. La vie dans cette boite de nuit tranche aussi avec l’insécurité alimentaire.
Certes l’insécurité avec son corolaire de morts, de violence, de discours de haine, est mise en avant dans les médias, mais, il faut aussi reconnaitre et sans démagogie, que grâce aux forces armées maliennes et internationales à l’occurrence la Minusma, il y a encore de la « vie » dans ces zones.
Aliou DIALLO